29 mars 2024
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A154, la route se dégage

Lors de la séance du Conseil communautaire du 18 décembre dernier, le président de Chartres métropole, Jean-Pierre Gorges, ne cachait pas sa satisfaction : le Premier ministre, Jean Castex, venait en effet de confirmer la mise en concession autoroutière de l'A154, annoncée lors de sa visite à Chartres le 18 novembre dernier.

« C'est une très bonne nouvelle pour notre territoire, s’est félicité Jean-Pierre Gorges, devant les élus de Chartres métropole. Et c’est d’autant plus important pour moi d’en faire part devant cette assemblée que c’est ici que tout a commencé. »

Un retour quelques années en arrière s’impose. Au début des années 2000, les élus de l’agglomération élaborent ensemble le Schéma de cohérence territoriale (SCOT), un document stratégique qui fixe les règles du de l’aménagement et du développement du territoire pour les années à venir, dans les domaines qui sont du ressort de la collectivité : l’économie, l’habitat, les transports, etc.

En matière de déplacements, un sujet particulier est identifié comme devant être absolument pris en compte : la mise en deux fois deux voies sécurisées de la liaison entre Chartres et Orléans, incluant le contournement Est de l’agglomération chartraine. Les enjeux de ce projet sont évidents : entre Rouen et Orléans, les routes à quatre voies et portions d’autoroutes se succèdent… sauf dans la traversée de l’Eure-et-Loir ; il s’agit donc de relier l’agglomération chartraine au maillage autoroutier inter-régional, et de rendre cette liaison plus sécurisée.

La seule solution réaliste

Si la pertinence d'une deux fois deux voies sécurisée entre Chartres et Orléans n'est pas contestable, le débat s'est focalisé assez tôt sur le moyen d'y parvenir.

« Depuis mon élection comme président de Chartres métropole en 2001, puis comme député à compter de 2002, j'ai toujours défendu ici comme à Paris la même conviction que pour désenclaver notre territoire dans des délais raisonnables et compatibles avec nos besoins de développement, l'unique solution serait l'aménagement en 2 x 2 voies de la RN 154 par une mise en concession autoroutière et la réalisation du contournement Est rapproché de l'agglomération chartraine. C'est dans ce but que le Syndicat Mixte d'Études et de Programmation (SMEP), qui a travaillé sur le SCOT, puis le Conseil communautaire de Chartres métropole, ont délibéré à de multiples reprises en faveur de ce scénario. »

Le recours à la concession autoroutière, c'est-à-dire le développement du réseau par des capitaux privés plutôt que les financements publics organisés dans le cadre des contrats de plan État-Régions, est en effet facteur d'une accélération significative du chantier. Comme l'a rappelé Jean-Pierre Gorges : « 77 années de Contrat de plan auraient été nécessaires pour poursuivre un aménagement partiellement engagé ! Autant dire que l'objectif était inatteignable et le besoin de sécuriser les usagers de l'axe toujours sans solution… »

Quand les élus parlent d'une même voix

Un tel projet ne pouvait toutefois trouver un écho favorable de la part des instances nationales qu'à la condition que les élus locaux présentent un front uni. « Cela n'a pas été simple et a exigé du temps ! Il a fallu faire œuvre de persuasion », concède le président de Chartres métropole.

Au milieu des années 2000, avec le soutien du préfet de l'époque, Patrick Subremon, un long travail a été mené pour présenter le projet aux élus du territoire et que la conviction d'un intérêt collectif se forge. « 95% d'entre eux ont au final adhéré au projet », se souvient Jean-Pierre Gorges.

Un autre temps fort est survenu en 2012, quand le président de la Région Centre-Val de Loire, François Bonneau, est venu apporter son soutien au projet, accompagnant notamment Jean-Pierre Gorges dans le bureau du ministre des Transports. « Quand l'ensemble des parlementaires, les Agglomérations de Chartres et Dreux, le Département, la Région et les communes traversées par la route nationale 154 ont enfin parlé d'une même voix, l'État a lancé le projet, conduit les études de faisabilité et procédé aux concertations publiques nécessaires en vue de rendre possible la continuité du réseau autoroutier entre la région Normandie et le sud de la France, ainsi qu'un grand contournement autoroutier de région parisienne », détaille le président de Chartres métropole.

Un consensus (épistolaire)

De nombreux courriers montrent la volonté et l'unité des parlementaires, des élus régionaux, départementaux et locaux, mais aussi des chambres consulaires derrière le projet d'aménagement autoroutier de l'A154. En voici quelques exemples.

Le 6 juillet 2009, dans un courrier adressé à François Fillon (pdf - 456 Ki), Premier ministre, les parlementaires d'Eure-et-Loir (Jean-Pierre Gorges, Gérard Hamel, Laure de la Raudière et Philippe Vigier, députés, et Joël Billard, Gérard Cornu et Albéric de Montgolfier, sénateurs) et les présidents des chambres consulaires (Joël Alexandre pour la CCI, Michel Cibois pour la Chambre de métiers et de l'artisanat et Philippe Lirochon pour la Chambre d'agriculture), affirment que « cet aménagement est absolument nécessaire pour des raisons de sécurité routière, de développement économique et d'aménagement du territoire » et insistent sur « l'urgence et l'impérieuse nécessité de l'aménagement aux normes autoroutières de l'itinéraire Nonancourt-Allaines, en incluant les dessertes de Dreux et de Chartres ».

Le 29 avril 2019, dans un courrier à l'attention de François de Rugy (pdf - 214 Ki), ministre de la Transition écologique et solidaire, le président de Chartres métropole, Jean-Pierre Gorges, le président du Conseil départemental d'Eure-et-Loir, Claude Térouinard, et le président de la Communauté d'agglomération du Pays de Dreux, Gérard Hamel, « confirment leur engagement sur la répartition du financement de la potentielle subvention d'équilibre comme suit : 50% pour le Conseil départemental d'Eure-et-Loir, 25 % pour Chartres métropole, 25 % pour la Communauté d'agglomération du Pays de Dreux ».

Le 7 octobre 2020, dans le courrier qu'ils adressent à Jean-Baptiste Djebbari (pdf - 194 Ki), ministre délégué chargé des transports, les élus régionaux, départementaux et locaux (voir signatures ci-contre) clament d'une même voix : « L'heure est désormais au choix du concessionnaire qui permettra l'achèvement de cette infrastructure tant attendue. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons collectivement et collégialement vous dire notre attachement à ce que le dossier puisse aboutir dans les délais les plus brefs. »

Dans sa réponse en date du 24 novembre 2020, le ministre délégué chargé des transports Jean-Baptiste Djebbari indique, à propos de l'achèvement de l'axe à deux fois deux voies entre Nonancourt et Allaines : « Je partage avec vous son caractère essentiel, pour l'attractivité économique de l'ouest du bassin parisien et du département d'Eure-et-Loir. Conformément aux dispositions retenues dans la Loi d'Orientation des Mobilités, le Gouvernement entend bien lancer ce projet, en recourant à une concession autoroutière. J'ai demandé aux services de mon Ministère de s'atteler à la préparation technique pour permettre l'engagement effectif de la procédure de concession. »

Le chaînon manquant

« La mise en concession de l'A154 est une bonne nouvelle pour les bassins de vie chartrains et drouais, pour le département, et plus largement pour la France, car ce chaînon manquant de 90 kilomètres (voir carte) est celui qui ferme le cercle de 100 kilomètres autour de la région parisienne et qui va donc, par voie de conséquence, désenclaver également le flux de transit en Île-de- France. » La réalisation de cette infrastructure est une clef majeure pour le développement de notre agglomération. Non seulement elle va l'arrimer aux grands flux nationaux, mais elle va en outre fluidifier les déplacements à son échelle, et ouvrir de réelles perspectives d'aménagement pour son secteur Nord, qui présente un fort potentiel de développement économique et touristique.

La mise en concession permettra de soutenir à une échelle élargie les échanges Nord-Sud entre la façade maritime normande et le Val de Loire, notamment au travers des aménagements du contournement Est de l'agglo, du diffuseur autoroutier à hauteur de Lèves-Poisvilliers et du nœud autoroutier en bordure Est du pôle urbain, permettant la connexion entre l'A11 et la future A154.

Au niveau local, pour les usagers comme pour les acteurs économiques, le projet d'aménagement de la RN 154 entraînera une amélioration des liaisons et des gains notables au niveau des temps de parcours entre la capitale régionale, Orléans, les principaux pôles urbains desservis et les ports normands. Il sera par ailleurs une réponse indispensable aux enjeux de sécurité routière. « Avec le contournement Est de l'agglomération, la rocade de Chartres va enfin redevenir un boulevard urbain. »

Limiter les contraintes

Limiter les impacts est également une préoccupation majeure du président de Chartres métropole. « Dès 2015, nous avons recensé, commune par commune, toutes les incidences et les contraintes que le projet est susceptible d'apporter (visuelles, environnementales, acoustiques, techniques…), ainsi que les compensations à envisager (murs antibruit, voies de contournement…). Tous ces éléments ont été transmis à la Direction régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement, en vue de leur prise en compte dans le dossier d'enquête publique lancé début 2016. »

Une attention particulière est également portée aux itinéraires de substitution utilisés par les habitants des communes situées le long de l'axe Chartres-Dreux. Les poids-lourds, qui seront captés par l'autoroute, n'emprunteront plus ces itinéraires, ce qui permettra au Conseil départemental, compétent en la matière, d'y consacrer les crédits nécessaires pour en améliorer l'usage pour les véhicules légers.

Enfin, concernant le franchissement des vallées, le choix s'est porté sur un aménagement en viaduc, qui a pour avantages à la fois de réduire la consommation de terre agricole et de limiter les impacts environnementaux sur la faune et la flore.

Autant de sujets sur lesquels nous serons amenés à revenir dans les mois à venir.

Quelques chiffres (distances et coûts)

Source : Autorité environnementale, 21 septembre 2016 (les données chiffrées peuvent varier selon l'origine et la date des documents ).

97 kilomètres à aménager en autoroute (réaménagement des 2 x 2 voies existantes et création de 2 x 2 voies en lieu et place des 2 x 1 voies actuelles), pour une estimation de 920 millions d'euros (étude 2016),
identifiés en 4 tronçons :

  • segment Nonancourt-Dreux : création de 45 km de voie nouvelle depuis Marville (sud de Dreux) jusqu'au nord de Nonancourt (nord-ouest de Dreux), estimation 506 M€ ;
  • segment Dreux-Chartres : 20 km (transformation de la 2 x 2 voies existante avec quelques rectifications de tracé), estimation 64 M€ ;
  • segment du contournement Est de Chartres (du sud de Poisvilliers jusqu'à la connexion avec la 2 x 2 voies à Berchères-les-Pierres) : 19 km de création de 2 x 2 voies, estimation 230 M€ ;
  • segment Chartres-Sud-Allaines : 25 km (création de 2 x 2 voies depuis Allonnes jusqu'au raccordement à l'A10 à Trancrainville, estimation 121 M€.

Le financement

La position des collectivités du département quant à leur participation au financement de la future A154 est constante depuis 2016.

Un dernier courrier du 29 avril 2019, adressé par les agglomérations de Chartres, Dreux et le Département d'Eure-et-Loir au ministre de la transition écologique, rappelait ces engagements et précisait la répartition des contributions financières entre les trois collectivités : sur une enveloppe de subvention d'équilibre estimée à 55,7M€, sachant que l'État supportera la moitié de la dépense, les 50% restants seront répartis comme suit : 50% pour le Conseil départemental d'Eure-et-Loir, 25% pour Chartres métropole et 25% pour Dreux Agglomération.