Un Colisée vertueux

Grands équipements.

Le Colisée offre dorénavant à la vue sa silhouette altière dans le paysage de la gare. Sa haute façade de verre et son flanc droit en imposent, tandis que la grande courbe de sa toiture, qui vient épouser le parvis, lui confère une indéniable élégance. Bien intégré dans son voisinage, on peut aussi dire de cet équipement qu'il est conçu « bien dans son temps ». Karine Dorange, vice-présidente en charge des Grands Équipements d'intérêt communautaire, dévoile quelques aspects de sa conception vertueuse.

Votre Agglo : Les jours de froid de saison et le contexte de tension sur les énergies pourraient nous inciter à crisper notre attention sur une frugalité énergétique souhaitée pour ce futur équipement. Indéniablement, cette première qualité est attendue. Qu'en sera-t-il ?

Karine Dorange : Ces questions de dépenses énergétiques sont évidemment très prégnantes. Heureusement, elles ne sont pas nouvelles pour les hommes de l'art et les ingénieurs qui travaillent à ce genre de projet. Ainsi, notre équipement dispose de plusieurs atouts qui vont contribuer à sa sobriété. Son dispositif de chauffage tout d'abord, qui met en œuvre non pas une classique chaufferie gaz mais l'association d'un système de thermofrigopompe et de groupes froid réversibles.

Cette combinaison est intéressante puisqu'elle permettra de générer simultanément du chaud et du froid, selon les besoins des différents espaces, et qu'elle repose sur l'exploitation des écarts de températures entre les différents espaces. Autre particularité : la chaleur et la fraîcheur générées sont distribuées dans l'équipement via des dispositifs différents selon les espaces : planchers chauffants, terminaux de climatisation, centrales de traitement d'air… ce qui en rend l'efficacité et le confort particulièrement adaptés.

Mais par ailleurs, l'architecture elle-même de l'équipement joue un rôle dans sa performance énergétique. Le bâtiment est en effet intégré dans le sol aux deux-cinquièmes, ce qui lui confère une sensibilité bien moindre aux conditions climatiques extérieures que s'il était entièrement hors sol. Et à cela s'ajoute sa toiture, dont la végétalisation renforcera encore cette résistance aux impacts de températures extérieures. Ce rôle sera assuré par les 21 cm d'épaisseur de substrat et des végétaux qui y pousseront, sur 5 500 m² de surface. Représentez-vous que cela reviendrait à végétaliser toute la façade occidentale de notre cathédrale, et que ce tapis végétal soit un isolant !

VA : Cette couverture est d'ailleurs un véritable millefeuilles ?

KD : En effet : elle est constituée de pas moins de 10 couches distinctes. De l'intérieur vers l'extérieur, elle comprend une épaisseur de baffles acoustiques (panneaux de traitement anti écho), 8 cm de revêtement acoustique, 30 cm de laine thermique et acoustique, 3 épaisseurs de BA 15 (plaques d'habillage de cloisons), le bac acier de soutènement, la dalle béton, la couche d'étanchéité, une nouvelle couche d'isolant, les 21 cm de substrat, et enfin les végétaux. Autant vous dire que cette toiture n'a pas pour seuls intérêts ses performances structurelles ou thermiques.

VA : La toiture joue donc aussi un rôle acoustique ? En quoi est-ce un trait remarquable de cet équipement ?

KD : On ne pouvait imaginer une salle de spectacles de ce niveau sans une acoustique performante. C'est bien sûr indispensable dans l'aréna pour éviter les effets d'échos ou d'amplifications parasites du son lors des spectacles ou des matches, mais pas que. Les efforts sur l'acoustique ont porté sur l'intégralité du Colisée. Notre équipement est conçu pour qu'une équipe sportive puisse jouer dans la salle d'entraînement tandis qu'aurait lieu la répétition d'un spectacle dans l'aréna, sans que l'un ne perturbe l'autre.

Et cette précaution englobe aussi les espaces logistiques : les bruits de chargements ou de déchargements des camions de traiteur ou de logistique spectacle, par exemple, ne doivent pas non plus interférer.

Pour aller jusqu'au bout, j'ajouterais que ce traitement de l'acoustique va jusqu'à soigner l'interaction entre l'intérieur et l'extérieur du bâtiment : un spectacle ne doit pas pâtir des bruits de la ville environnante… ni le voisinage des décibels des spectacles.

VA : Un mot sur le choix du positionnement de l'équipement dans la ville ?

KD : Dès le départ, nous voulions que cet équipement soit en centre d'agglomération, puisque c'est là qu'il sera le plus facilement accessible à tous. Nous nous refusions de l'exiler quelque part au milieu des champs. En cœur d'agglo, et a fortiori en connexion immédiate avec l'important nœud intermodal que constituent la gare SNCF et la future gare routière, il sera accessible par l'ensemble des transports en commun : TER, bus, cars et le futur BHNS de Chartres métropole. Il bénéficiera aussi de l'offre de stationnement du parking de la gare, qui sera en bonne partie déserté le soir après les journées de travail des pendulaires, et des parkings République, Châtelet et Cœur de Ville.

En cela aussi, on peut dire que notre Colisée est vertueux : il tire le meilleur parti des infrastructures existantes, sans qu'il soit nécessaire de lui dérouler les longs rubans de bitume de routes et de stationnement ordinairement indispensables à l'accès de tels équipements. C'est précisément cette complémentarité avec le voisinage du « hub » de la gare qui nous a valu la contribution de 3,8 millions d'euros de la Région, soucieuse de ces questions d'optimisation des intermodalités.

Je finirais par une dernière considération sur cet ouvrage, d'ordre patrimonial, cette fois. Avec son dessin architectural soigné, on peut dire sans fausse modestie que le Colisée viendra renforcer notoirement l'attractivité de ce futur quartier de la gare. Associées à celles de la passerelle, et renforcées par leur dispositif de mise en lumière, ses lignes offriront un ensemble harmonieux qui constituera pour nos visiteurs un signal visuel fort en sortie de train.

Une façon d'affirmer haut et fort : « une cathédrale certes, mais bien plus encore ! »

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